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des arts A. Malraux

Robert H. Jackson, “ Jack Ruby tuant Lee Harvey Oswald ”, 1963

Épreuve gélatino-argentique

Robert H. Jackson, Jack Ruby tuant Lee Harvey Oswald, 1963 ; épreuve gélatino-argentique

 

Employé du Dallas Times Herald, Robert Hill Jackson (1934-) remporte le prix Pulitzer pour ce cliché de l’assassinat de Lee Harvey Oswald (1939-1963). Si le photographe avait manqué l’homicide contre John Fitzegarld Kennedy (1917-1963) parce qu’il changeait la pellicule de son appareil, il est parfaitement placé, 2 jours plus tard, pour saisir le meurtre du principal suspect de l’assassinat du président américain : il se trouve alors dans la cave du quartier général de la police de Dallas, lorsque Lee Harvey Oswald s’apprête à être transféré dans la prison voisine en fourgon blindé. Tandis que ce dernier est conduit à l’extérieur, entouré par un groupe d’officiers de police, le prisonnier reçoit une balle dans l’abdomen – tirée par Jack Ruby (1911-1967).

Dans ce cliché devenu iconique, Robert Hill Jackson parvient à saisir l’action centrée sur Lee Harvey Oswald, ainsi que les réactions de ceux qui l’entourent : le détective Jim Leavelle [(1920-2019) détective américain au département de police de Dallas], en costume blanc, se recule, déconcerté par ce qui est en train d’arriver. À sa gauche, un homme, cigare à la bouche, tend la main pour attraper Jack Ruby – quoique sans grande conviction. Derrière lui, un journaliste, micro à la main, ne semble pas encore comprendre ce qui se joue sous ses yeux. Jack Ruby est vu de dos et son arme disparait presque dans la profondeur du pull noir de Lee Harvey Oswald, mais son corps semble noué de tensions, tandis que le visage de sa victime se contracte sous l’effet du choc et de la douleur. Autour d’eux, les figures floues contribuent à la force de cette image en reflétant notre pulsion voyeuriste.

Notons que le public possède un appétit vorace pour les histoires de crimes, qui font d’ailleurs vendre les journaux ! En règle générale, la photographie représente la scène où s’est produit l’événement, mais ne représente pas le crime lui-même. Toutefois, il arrive que les photographes se trouvent au bon endroit au bon moment – tel que Robert H. Jackson pour la réalisation de ce cliché représentant Jack Ruby tuant Lee Harvey Oswald (1963).

De la photographie post-mortem de l’époque victorienne aux images de guerre, les photographies de personnes défuntes sont un moyen de conserver des souvenirs pour la postérité, et est, parfois même, une source d’amusement lugubre. C’est particulièrement la photographie de guerre qui introduit la mort dans l’environnement domestique (cf. Une histoire de la photographie # 3 : Timothy H. O’Sullivan, Une moisson de morts, 1863). Pour certain·es personnes, la prolifération de telles images rend le public insensible à la mort et carnage. Mais qu’en est-il des réactions face aux terribles photographies des détenus décédés de la prison d’Abou Grahib (2006), ou de l’image effroyable d’un enfant syrien mort noyé et échoué sur une plage (2015), ou plus récemment, des gisants et mutilés des guerres d’Ukraine et de Palestine ?