ville de Douarnenez centre
des arts A. Malraux

George Hoyningen-Huene, “ Plongeurs ”, 1930

Épreuve argentique

George Hoyningen-Huene, Plongeurs (Maillot de bain deux-pièces avec caleçon rouge grenat et débardeur en laine alpaga rouge et blanc, à la manière d’un pull-over, 1930 ; épreuve argentique

 

Au tournant du XXe siècle, le développement des magazines illustrés crée une forte demande de photographies de mode. Dans les années 1920, le genre est désormais établi, et compte de nombreux spécialistes – dont George Hoyningen-Huene (1900-1968) fait partie.

Né dans une famille de l’aristocratie russe, le photographe fuit un temps la Révolution et s’installe à Londres, puis à Paris. En 1935, il part pour les États-Unis où il réalise un grand nombre de clichés de mode en studio, remarquables pour leur composition. Mais l’innovation du travail de George Hoyningen-Huene tient surtout dans l’introduction des séances en extérieur et dans la popularisation des prises de vue en plongée et des mannequins masculins, tels que Horst P. Horst (1906-1999) – protégé et amant de George Hoyningen-Huene, devenu lui-même un photographe de renom.

Si la légende qui accompagne ce cliché dans le numéro du Vogue américain daté de juillet 1930 (« Maillot de bain deux-pièces avec caleçon rouge-grenat et débardeur en laine alpaga rouge et blanc, à la manière d’un pull-over ») est primordiale pour tout acheteur potentiel (précisions de couleur et de matière), elle ne rend pas justice à la beauté de l’image, son élégante simplicité : à l’arrière-plan, une ligne horizontale délimite le ciel et la mer en 2 aplats ; au 1er plan, un plongeoir conduit notre regard vers l’horizon qu’un couple, assis au centre de l’image, en maillot de bain, contemple également ; la symétrie de la composition et la lumière du soleil d’été accentuent les lignes des corps des modèles, et bien que nous ne voyons pas leurs visages, tournés vers la mer, nous éprouvons le désir que leur posture exprime.

Pourtant, l’horizon que nous projetons ici est imaginaire : en réalité, la photographie est prise sur le toit du studio parisien de Vogue, au-dessus des Champs-Élysées. Le ciel est donc celui de Paris, la mer… la balustrade de l’immeuble (à moins qu’il ne s’agisse d’une toile de fond peinte), et le plongeoir… de simples caisses et planches sur lesquelles sont assis les modèles. George Hoyningen-Huene joue ici sur le flou, la profondeur de champ, et utilise des éclairages artificiels pour fabriquer le soleil écrasant d’un bord de mer. Ainsi, lorsqu’elle met en scène des compositions crées de toutes pièces ou dispose ses sujets dans un décor réel, la photographie invite le regardeur à s’interroger sur la réalité de ce qu’il a sous les yeux.