ville de Douarnenez centre
des arts A. Malraux

Ansel Adams, “ Lignes électriques dans le désert de Mojave ”, 1941

Archives nationales, Washington D.C., États-Unis

Ansel Adams, Transmission Lines in Mojave Desert, 1941 ; archives nationales, Washington D.C., États-Unis

 

Après avoir reproduit la vision romantique transmise par les tableaux du XIXe siècle, la photographie de paysage diversifie ses explorations et s’intéresse à l’étude scientifique des formations géologiques et à l’impact de l’Homme sur son environnement : dès les années 1860, plusieurs photographes documentaristes américains optent, pour une représentation plus exacte, plus pure du vaste paysage national.

La photographie pure s’inscrit en réaction contre le pictorialisme : elle s’attaque à celleux qui comparent le médium à la peinture au lieu de prendre en compte ses contraintes et possibilités propres. Ce virage intervient au moment où le modernisme commence à gagner toutes les formes d’art. En Californie, Edward Weston (1900-1968) cofonde le Groupe f/64 aux côtés d’Ansel Adams (1902-1984). Le Groupe f/64 est plus qu’un collectif de photographes partageant les mêmes idées : dès le départ, sa défense d’une esthétique moderniste – qui défend la photographie pure – s’associe à une posture politique. Le groupe produit des images très nettes et précises à l’aide d’appareils grand format, en répudiant toute manipulation. Certaines images iconiques – notamment celles de Paul Strand (1890-1876) ou Edward Weston (cf. Une histoire de la photographie # 10, Edward Weston, Poivron n°30, 1930) – célèbrent ainsi la beauté et la pureté formelle du sujet, et ajoutent une esthétique abstraite qui rend plus ambigus les formes et les volumes, et contribue, avec les pionniers du XIXe siècle, à forger les modèles de référence de la photographie de paysage.

C’est précisément après avoir vu une exposition de Paul Strand que Ansel Adams abandonne l’esthétique pictorialiste – qui domine jusque-là son œuvre – au profit d’une représentation plus directe du monde naturel. Les images des paysages américains, en particulier des parcs nationaux de l’Ouest américain qu’il produit alors font de lui l’un des photographes les plus admirés du pays. En effet, lorsqu’il se lance dans la photographie à l’âge de 25 ans, Ansel Adams devient un défenseur de l’environnement, militant pour la préservation et la protection des espaces sauvages américains. Il est également l’inventeur du zone system qui permet de déterminer l’exposition optimale et de prévisualiser la photographie développée.

On trouve souvent des traces de la présence humaine dans les photographies les plus célèbres d’Ansel Adams, tel que dans Moonrise, Hernandez, New Mexico (1941) où des habitations et des croix, plantées en désordre au 1er plan, trahissent ladite présence humaine. La lune, se détachant d’un ciel sombre qui occupe la moitié de l’image, se lève au-delà d’un paysage austère et illumine en contre-jour les nuages, les montagnes, la ville. De leur côté, les photographies de l’artiste qui représentent des constructions humaines pour sujets principaux sont moins connues. Pourtant, elles sont dotées d’une présence fascinante et quasi-abstraite – propre à la photographie pure.

Transmission Lines in Mojave Desert fait partie d’un reportage que le photographe consacre aux vastes structures construites près des grands fleuves américaines. À l’horizon, le soleil, presque dissimulé par une chaîne de montagnes, efface la plupart des détails du paysage ; notre attention se concentre sur l’immense structure métallique qui semble sortir de terre. Cette photographie préfigure l’œuvre de certains photographes environnementalistes qui décrivent l’impact profond de l’industrie sur le monde naturel.