ELSA TOMKOWIAK

Elsa Tomkowiak est née en 1981 à Saint-Vallier (71). Elle vit et travaille à Douarnenez (29).

« Si vous voulez que le voisinage d’une couleur donne de la grâce à une autre couleur, imitez la nature, et faites avec le pinceau ce que les rayons
du soleil font sur une nuée lorsqu’ils imitent l’arc-en-ciel. »
Léonard de Vinci (1452-1519)

Précisément, Elsa Tomkowiak se fascine pour le caractère changeant de la lumière, sa capacité à passer d’une couleur à l’autre de manière infinie. D’après les fréquences chromatiques qui constituent le prisme lumineux, elle élabore une palette spécifique aux teintes vives, pures, franches et éclatantes. Pour l’artiste, la couleur est un vecteur d’énergie, son outil premier pour répandre la lumière dans l’espace et sa meilleure alliée pour travailler à une échelle souvent monumentale. Les œuvres d’Elsa Tomkowiak offrent une expérience immersive façonnée par l’espace qu’elles investissent, résultant d’une réflexion sur la lumière et sa matière, l’espace et sa forme, et l’énergie du geste qui s’y déploie et y projette le corps. « La lumière est systématiquement le point de départ de mon travail. Elle est composée d’une quantité de couleurs que je fragmente, diffracte
et répand dans l’espace. »

L’œuvre d’Elsa Tomkowiak se distingue de la pratique picturale traditionnelle notamment par la jubilation de l’artiste à manipuler et répandre cette couleur sur les supports les plus divers susceptibles de satisfaire son désir de coloris fluo : l’artiste conçoit ses installations à partir de matériaux légers, courants et détournés de leur fonction première (carton, Placoplatre, bâches plastiques et film polyane, etc.) choisis pour leurs qualités plastiques, sculpturales (par exemple, des matériaux transparents laissent la lumière les traverser). Sur ces matériaux se ressent la vitalité des gestes de l’artiste et des outils qui les prolongent (brosses, balais, etc.). La force expressive de la peinture d’Elsa Tomkowiak s’épanouit dans l’énergie de l’action spontanée tout autant que dans sa retenue, des mouvements qui engagent le corps à l’œuvre. Les accidents, les éclaboussures, les taches sont inévitables et nécessaires. Derrière l’expérimentation picturale qui la caractérise, la peinture d’Elsa Tomkowiak révèle un engagement total qui promeut un rapport direct, physique avec le lieu et tend à favoriser une expérience sensorielle, voire viscérale avec la couleur. Plus encore, Elsa Tomkowiak choisit de « ne pas dissocier sa vie de son travail » et aborde l’espace chromatique, l’amplitude de la forme et la manipulation de la matière de manière globale : elle entretient avec la couleur un rapport passionnel qui implique son propre corps (collants fluo s’échappant d’une toile noire, fards à paupières électriques étirés jusqu’aux tempes, teintures capillaires bleues,
roses ou platine selon ses humeurs).

Depuis peu, Elsa Tomkowiak pense à la conservation de ses pièces, souvent éphémères et généralement conçues in situ, et envisage leur témoignage sous forme de peintures abstraites : les matières reparues de divers événements artistiques sont découpées, froissées, compressées, emballées, enfermées telles des reliques dans des cadres noires dont
elles semblent vouloir s’extraire, du moins se prolonger au-delà de leurs limites. Au mur, chaque élément, quoique potentiellement autonome, s’inscrit au cœur d’une grille mathématiquement définie qui rejoue les gammes chromatiques et progressions de tons des installations initiales tant acclamées. Dans le cadre de cette exposition, autour / au cœur d’installations immersives et pénétrables conçues spécifiquement en résonance avec l’environnement architectural (le Centre des arts André Malraux) et naturel (le port du Rosmeur), Elsa Tomkowiak rejoue la mise en espace de sculptures modestes dans lesquelles se ressent toute l’énergie du geste de l’artiste, et expose ses œuvres récentes : tableaux abstraits au-delà du cadre desquels les reliques d’installations passées tentent de s’étendre. Une collection de petits formats (expérimentation de matières, dessins au maquillage, élaboration de nuanciers, esquisses préparatoires et autres témoignages photographiques d’interventions insitu… ) accompagne l’ensemble et nous immerge dans le processus de création de l’artiste. « Mais peut-être, plutôt que de disséquer les composantes de mon travail, nous devrions aborder les choses comme un tout. Ça a peut-être
à voir avec le chaos ? […] On vit dans un univers mouvant, désordonné, sauvage, et violent, que l’on cherche par tous les moyens à maîtriser. Je me demande si je ne cherche pas finalement à créer des espaces où le chaos aurait sa place. Il s’agit peut-être d’un chaos filtré ! »

                                                   ©  Jean-Sylvain Roveri

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Elsa Tomkowiak est diplômée de l’École Nationale Supérieure d’Art de Dijon. Elle est représentée par la galerie The Merchant House, Amsterdam, Pays-Bas. Depuis 2011, elle est membre du groupe Pleasure Interlude aux côtés de Charles Monroe de Rais, Purple George et Yu Jim. En 2008, elle reçoit le Prix des Arts Plastiques de la ville de Nantes et reçoit de nombreuses Aides à la création entre 2007 et 2011 (Drac Bourgogne, région Pays de la Loire, Drac Pays de la Loire).